La criminologie perdue d’Alexandre Lacassagne (1843-1924) – Marc Renneville – Criminocorpus
De 1885 à 1914, Lyon a été la capitale de la criminologie française. Le docteur Alexandre Lacassagne (1843-1924), professeur titulaire de la chaire de médecine légale, s’impose, avec ses expertises (affaire dite de la « malle à Gouffé », Caserio, Joseph Vacher…), ses écrits, avec la création des Archives d’anthropologie criminelle et les nombreux étudiants en médecine qui travaillèrent sous sa direction, comme la figure dominante de cette période. Sa propre théorie du crime et du passage à l’acte a pourtant connu une postérité paradoxale. Tandis que Cesare Lombroso (1835-1909) a toujours été reconnu comme l’un des pères fondateurs de la criminologie et l’exemple même de ce qu’il ne faut pas faire ; Lacassagne, qui fut l’un de ses premiers contradicteurs, ne sort de l’oubli que depuis quelques années, et moins sous l’effet d’une actualisation de sa théorie que par les travaux cumulés d’historiens.
La criminologie de Lacassagne a souvent été condensée, par lui-même comme par ses élèves, en trois « aphorismes » :
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« le milieu social est le bouillon de culture de la criminalité ; le microbe, c’est le criminel, un élément qui n’a d’importance que le jour où il trouve le bouillon qui le fait fermenter »
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« au fatalisme qui découle inévitablement de la théorie anthropologique, nous opposons l’initiative sociale »
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« la justice flétrit, la prison corrompt et la société a les criminels qu’elle mérite »
Alexandre Lacassagne « Les transformations du droit pénal et les progrès de la médecine légale, de 1810 à 1912 », Archives d’anthropologie criminelle, 1913, p. 364.