Ayant tenté de définir le domaine de la poésie, je devrais à présent m’essayer à envisager l’opération même du poète, les problèmes de la composition et de la facture.
Mais ce serait entrer dans une voie bien épineuse. On y trouve des tourments infinis, des disputes qui ne peuvent avoir de fin, des épreuves, des énigmes, des soucis et même des désespoirs qui font le métier de poète un des plus incertains et des plus fatigants qui soient.
Le même Malherbe que j’ai déjà cité, disait qu’après avoir achevé un bon sonnet, l’auteur a droit de prendre dix ans de repos. Encore admettait-il par là que ces mots : un sonnet achevé signifient quelque chose… Quant à moi, je ne les entends guère… Je les traduis par sonnet abandonné.
Paul Valéry – Propos sur la poésie (1924)
