« La vieillesse nous attache plus de rides en l’esprit qu’au visage »

Mais il me semble qu’en la vieillesse nos âmes sont sujettes à des maladies et imperfections plus importunes qu’en la jeunesse.

Je le disais étant jeune ; alors on me donnait de mon menton par le nez. Je le dis encore à cette heure que mon poil gris m’en donne le crédit. Nous appelons sagesse la difficulté de nos humeurs, le dégoût des choses présentes. Mais, à la vérité, nous ne quittons pas tant les vices comme nous les changeons, et, à mon opinion, en pis.

Outre une sotte et caduque fierté, un babil ennuyeux, ces humeurs épineuses et inassociables, et la superstition, et un soin ridicule des richesses lorsque l’usage en est perdu, j’y trouve plus d’envie, d’injustice et de malignité. Elle nous attache plus de rides en l’esprit qu’au visage ; et ne se voit point d’âmes, ou fort rares, qui en vieillissant ne sentent à l’aigre et au moisi.

L’homme marche entier vers son croît et vers son décroît.

Michel de MontaigneEssais (1588)

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