« Lisez, mais pensez »

Je voudrais bien que ces lectures ne fussent pas de simples lectures. 

[…] Toute étude où l’esprit reste inactif et ne fend pas à mesure qu’il reçoit, en un mot, ne produit pas, n’est pas plus une étude que voir n’est regarder.

Notre siècle est malade de trop lire et de lire mal ; la lecture, qu’on a appelée une paresse occupée, et qu’on pourrait appeler une activité paresseuse, est la principale occupation de beaucoup de gens, dont la pensée, incessamment mais faiblement sollicitée sur mille points différents, meurt partout à fleur de terre, et finit par n’avoir plus ni vigueur, ni spontanéité, ni indépendance.

Sans une réaction volontaire du lecteur sur les pensées de l’auteur, la lecture est souvent un mal plutôt qu’un bien. Avaler n’est rien si l’on ne digère : malheur à qui l’oublie ; malheur à qui se rend complice de cette voracité ou de cet appétit sans prudence  […] !

Lisez, mais pensez ; et ne lisez pas si vous ne voulez pas penser en lisant, et penser après avoir lu.

Alexandre Rodolphe VinetL’intelligence humaine jugée par St. Paul (1835)

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